Benoit Duteurtre

Benoit Duteurtre (par Claude Truong Ngoc) – octobre 2015.jpg

Très lié à mes parents, musiciens et enseignants, Benoit Duteurtre était intégrée à notre vie familiale en Normandie. Il se joignait donc souvent à nos repas, et aux soirées musicales que nous organisions régulièrement.

Il communiquait régulièrement avec ma mère, (qui fût son professeur de musicologie à l’université de Rouen),  sur leurs idées et écris musicologiques;

Cette proximité lui permet aussi de prendre des leçons avec mon père Olivier Bernard, pianiste et compositeur, professeur au Conservatoire Régional de Rouen.

Il avait depuis longtemps deux chambres dans la maison de mes parents, en Normandie, afin de venir écrire au calme.

Benoit est mort récemment, et va beaucoup nous manquer. Aussi je poste ici un petit rappel de sa biographie.

Biographie

Benoît Duteurtre, né le 20 mars 1960 à Sainte-Adresse (Seine-Maritime) et décédé le 16 juillet 2024 à Vandœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), était un écrivain, essayiste, critique musical, ainsi que producteur et animateur de radio français.

Jeunesse et formation
Benoît Duteurtre voit le jour à Sainte-Adresse, près du Havre, où il passe son enfance. Fils de Jean-Claude Duteurtre et Marie-Claire Georges, il est également le petit-fils de Maurice Georges et l’arrière-petit-fils de René Coty, ancien président de la République, par sa mère. Il fait ses études au lycée François-Ier du Havre puis à l’Institution Saint-Joseph, un établissement privé catholique. À quinze ans, il soumet ses premiers textes à l’auteur dramatique Armand Salacrou, installé au Havre, qui l’encourage à poursuivre dans cette voie. La ville du Havre, marquée par les destructions de la Seconde Guerre mondiale et sa reconstruction classique, occupera une place importante dans son œuvre.

Passionné très tôt par la musique, notamment contemporaine, Duteurtre se considère comme un disciple de Pierre Boulez. En 1977, il commence des études de musicologie à l’université de Rouen. Durant cette période, il rencontre des compositeurs de renom tels que Karlheinz Stockhausen en 1977, Iannis Xenakis en 1978, et étudie un mois avec György Ligeti en 1979. Il obtient ensuite sa licence de musicologie.

Premières publications
Tout en étudiant, Duteurtre continue d’écrire. En 1982, il envoie plusieurs textes à Samuel Beckett, qui lui conseille de les soumettre à la revue Minuit des Éditions de Minuit. Il s’installe à Paris, où il joue du piano au festival musical du Printemps de Bourges et dans les spectacles de Norbert Letheule au théâtre des Amandiers de Nanterre, collaborant avec des musiciens comme Bernard Lubat et Henri Texier. Il participe également à l’enregistrement du tube « Paris Latino » et occupe divers petits emplois, comme vendeur au BHV, sondeur, et accompagnateur de cours de danse.

En 1985, il publie son premier roman, Sommeil perdu, qui raconte l’histoire d’un jeune homme dépressif quittant sa ville natale pour s’installer à Paris. En 1987, il publie Les Vaches (réédité en 2000 sous le titre À propos des Vaches), qui dépeint la vie d’un garçon oscillant entre l’année scolaire au bord de la mer et les vacances à la montagne. Ses nouvelles sont publiées dans le magazine L’Infini, dirigé par Philippe Sollers, et il collabore également avec des revues comme Playboy (édition française), La Vie catholique, Les Lettres françaises, Révolution, et Détective.

En 1990, Duteurtre découvre New York, une ville qui le fascine. Il y fait la connaissance de l’écrivain américain Bruce Benderson, avec qui il se lie d’amitié. Son roman L’Amoureux malgré lui est publié en 1989, suivi de Tout doit disparaître en 1992. Dans ce dernier, il relate les expériences d’un jeune journaliste, inspirées de ses propres débuts dans le journalisme et la critique musicale. Il envoie ce livre à Guy Debord, qui lui répond chaleureusement : « Il vous a suffi de voir le même siècle et sa sorte d’art, vous l’avez ressenti justement. » Tout doit disparaître aborde également les réflexions de l’auteur sur la musique contemporaine, notamment sur l’évolution de la musique classique française à la fin du XXe siècle et son faible attrait auprès du grand public, des idées qu’il développera davantage dans son essai Requiem pour une avant-garde.

Requiem pour une avant-garde** est un essai publié en 1995 qui examine et critique la musique contemporaine ainsi que son institutionnalisation en France. Cet ouvrage suscite de vives réactions dans la presse. Dans Le Monde, Anne Rey établit une comparaison entre Duteurtre et le révisionniste Robert Faurisson. En réponse, Duteurtre attaque le journal et remporte son procès, ce qui oblige Le Monde à publier son droit de réponse. Des publications telles que Le Point, Le Monde de la musique, Diapason et l’International Herald Tribune soutiennent également le travail de l’auteur. Bien qu’une part significative de cet essai soit dédiée à la critique de l’œuvre et de l’influence de Pierre Boulez, Benoît Duteurtre aborde également la question d’une certaine nostalgie pour la Belle Époque et ses répercussions sur la France contemporaine. Cette thématique réapparaîtra fréquemment dans ses romans ultérieurs.

En 1996, le roman **Gaieté parisienne** est publié, explorant la communauté gay de Paris. Le protagoniste, un homme sur le point d’atteindre la trentaine, s’inquiète de la monotonie de son existence. En 1997, **Drôle de temps**, un autre roman, remporte le prix de la nouvelle de l’Académie française. Milan Kundera en fait une critique bienveillante dans *Le Nouvel Observateur* et rédige la préface de l’édition Folio. Philippe Muray écrit également un article qui, tout en soulignant la perspicacité des personnages et des situations de Duteurtre, met en avant le rôle de l’écrivain dans la société.

En 1999, **Les Malentendus** est publié, mettant en scène un jeune immigré arabe, une femme chef d’entreprise, un étudiant de Sciences Po et un handicapé homosexuel, dont les destins se croisent et s’influencent mutuellement. En 2001, son roman **Le Voyage en France** reçoit le prix Médicis. Dans cette œuvre, un jeune Américain fasciné par le Paris de la fin du XIXe siècle découvre la France contemporaine et croise le chemin d’un homme, journaliste vivant à Paris, qui oscille entre des périodes de dépression et d’euphorie.

**Service Clientèle**, publié en 2003, se compose de courts chapitres traitant des défis rencontrés face aux services d’assistance commerciale et technique des entreprises proposant des téléphones mobiles, des billets d’avion ou des connexions Internet. Cette œuvre, traduite dans plusieurs langues, est également commentée avec bienveillance par François Taillandier dans le quotidien *L’Humanité*.

« La Rebelle », un roman publié en 2004, retrace la vie d’une présentatrice de télévision de gauche, ambitieuse et carriériste, qui croise la route d’un jeune informaticien égyptien homosexuel, d’un escroc et du PDG d’une grande entreprise française. En 2005, « La Petite Fille et la cigarette » voit le jour, relatant la chute d’un fonctionnaire et les répercussions de la dernière requête d’un condamné à mort. Ce roman, traduit en une vingtaine de langues, est adapté sur scène en République tchèque et en Roumanie. En 2013, il devient sujet de polémique aux États-Unis après avoir été plagié par l’acteur Shia LaBeouf sous le titre « Stale N Mate ». Une version dessinée de ce livre, réalisée par Sylvain-Moizie, sort en 2016 aux éditions La Boîte à Bulles. « Chemin de fer », publié en 2006, présente le journal intime d’une femme quinquagénaire, partagée entre sa brillante carrière parisienne et son amour pour une petite maison dans un village montagnard, où elle tente de s’éloigner du monde moderne. Ce roman est également une réflexion sur l’évolution de notre société et le progrès, qui semble souvent conduire à des régressions. Benoît Duteurtre contribue aussi à la fondation de la revue littéraire « L’Atelier du roman », aux côtés d’auteurs tels que Milan Kundera et Michel Houellebecq. En mars 2007, il publie un article intitulé « Muray est une fête », à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Philippe Muray. Deux numéros de « L’Atelier du roman » sont consacrés à « Voyage en France » (n° 31) et à l’œuvre de Benoît Duteurtre (n° 76).

« Chemin de fer », publié en 2006, dévoile le journal intime d’une femme d’une cinquantaine d’années, qui jongle entre sa carrière brillante à Paris et son attachement à une modeste maison dans un village de montagne, où elle cherche à s’éloigner des tumultes du monde moderne. Cette œuvre propose également une réflexion sur l’évolution de notre société et sur un progrès qui semble souvent s’accompagner de régressions.

Benoît Duteurtre contribue à la création de la revue littéraire « L’Atelier du roman », aux côtés d’auteurs tels que Milan Kundera et Michel Houellebecq. En mars 2007, il publie un article intitulé « Muray est une fête », à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Philippe Muray. Deux numéros de « L’Atelier du roman » sont dédiés au « Voyage en France » (n° 31) et à l’œuvre de Duteurtre (n° 76).

En août 2007, « La Cité heureuse » présente Town Park, une ville fictive transformée en parc d’attraction culturel, gérée par une entreprise nommée la Compagnie. Parmi les résidents devenus animateurs, un scénariste de séries télévisées tente de s’adapter aux nouvelles tendances. La même année, il publie « Ma belle époque », un recueil d’articles parus dans la presse, que l’auteur décrit comme « une sorte d’autoportrait ».

« Les Pieds dans l’eau », sorti fin août 2008, évoque la relation de Duteurtre avec la plage d’Étretat, station balnéaire qu’il a longtemps fréquentée. Ce récit autobiographique explore également son milieu social et sa famille, marqués par la figure de son arrière-grand-père, le président René Coty.

En 2009, « Ballets roses », publié chez Grasset dans la collection « Ceci n’est pas un fait divers », s’intéresse aux aventures d’André Le Troquer, ancien résistant et président de l’Assemblée, avec de jeunes adolescentes. « Le Retour du Général », sorti en mars 2010, imagine le retour du Général de Gaulle, âgé de 120 ans, dans la France contemporaine. Il est suivi de deux romans autobiographiques : « L’Été 76 », inspiré de l’adolescence de l’auteur, et « À nous deux Paris », qui retrace les débuts parisiens d’un personnage ressemblant à Duteurtre dans les années 1980.

Dans « Polémiques » (2013) et « La Nostalgie des buffets de gare » (2015), Duteurtre compile diverses réflexions sur la société moderne, notamment sur l’évolution des voyages en train. Son roman « L’Ordinateur du Paradis », une fantaisie sur la surveillance généralisée, nous plonge dans un paradis évoquant un centre commercial et figure parmi les premières sélections du prix Goncourt 2014.

Enfin, « Livre pour adultes », publié en 2016, est un roman très personnel où l’auteur mêle souvenirs, essais, fictions, humour et nostalgie. Ce livre est également présent en 2016 dans les sélections des prix Renaudot, Interallié, et du grand prix du roman de l’Académie française.

Carrière musicale

En 1991, Benoît Duteurtre est désigné conseiller musical pour la Biennale de Lyon dédiée à la musique française. Cette mission lui permet de collaborer avec Manuel Rosenthal, chef d’orchestre et ancien élève de Maurice Ravel. La même année, il rencontre le compositeur Olivier Messiaen, qu’il considère comme « le dernier véritable génie de la musique française ». En 1993, il prend la direction de la collection Solfèges aux éditions du Seuil. En 1995, aux côtés de Marcel Landowski, il cofonde l’association Musique nouvelle en liberté pour soutenir la création musicale contemporaine. Depuis 2000, il en assure la présidence avec Jean-Claude Casadesus à sa tête. Reconnu comme une figure influente dans le domaine musical, particulièrement dans les cercles politiques de droite, il a travaillé dans les années 1990 avec Marcel Landowski, ancien directeur des affaires culturelles de la Ville de Paris.

En mars 2004, le texte de Duteurtre pour la comédie musicale Vive l’Opéra-Comique de Jérôme Savary est mis en scène à l’Opéra-Comique à Paris. En 2008, il adapte le livret de l’opérette Véronique d’André Messager, dirigée par Fanny Ardant au Théâtre du Châtelet.

Par ailleurs, Duteurtre donne chaque année des conférences à la Fondation Singer-Polignac sur divers thèmes musicaux.

En 2005, il est élu membre de l’académie Alphonse-Allais.

Radio et télévision

Benoît Duteurtre est l’initiateur et présentateur de l’émission télévisée Les Folies de l’opérette, diffusée en 2005 sur France 3 et France 5. Entre 1996 et 1999, il anime l’émission radiophonique Les Beaux Dimanches sur France Musique, à l’invitation de Jean-Pierre Rousseau. Depuis 1999, il produit et présente Étonnez-moi Benoît, une émission hebdomadaire sur France Musique, dédiée à l’opérette, à la chanson populaire et à la musique légère. Il y invite divers artistes et experts, dont Pierre-Marcel Ondher et Serge Elhaïk, spécialistes des grands orchestres de variétés.

Depuis plusieurs années, il présente également le Concert du nouvel an de Vienne, diffusé chaque 1er janvier sur France 2.

Traduit dans une vingtaine de langues, Duteurtre collabore en tant que journaliste avec Marianne et tient des chroniques régulières pour Le Figaro littéraire, Le Monde de la musique et Classica. Il a également siégé au comité de lecture des éditions Denoël.

En 2018, il se présente à l’Académie française, mais l’élection du 22 novembre ne consacre ni lui, ni son rival Pascal Bruckner.

Vie privée et prises de position

En novembre 2013, Benoît Duteurtre signe le « Manifeste des 343 salauds », publié dans la revue Causeur, en soutien aux hommes ayant recours à la prostitution.

Bien qu’ouvertement homosexuel, il défend l’idée selon laquelle « l’hétérosexualité demeure la norme, tandis que l’homosexualité représente une exception », malgré les efforts pour promouvoir une égalité entre les deux orientations. Dès 1996, il avait soutenu une pétition en faveur du « CUC », précurseur du PACS. Cependant, durant les débats sur le mariage pour tous, il émet des réserves, critiquant certains homosexuels qui, selon lui, « voient dans le mariage une manière de valider leur sexualité minoritaire, influencés par la théorie du genre et le désir d’avoir des enfants ».

Duteurtre critique également Anne Hidalgo, maire de Paris, dans son livre Les Dents de la maire : Souffrances d’un piéton de Paris. Ses critiques envers la capitale remontent à 2001, préférant vivre en Normandie ou à New York, jugeant que « le monde moderne semble s’être installé dans un décor historique » à Paris, ville où il avait pourtant remporté le prix Médicis mais dans laquelle il ne se sentait pas vraiment chez lui.

Décès

Benoît Duteurtre décède d’une crise cardiaque le 16 juillet 2024 à Vandœuvre-lès-Nancy, après avoir été victime d’un malaise dans sa résidence secondaire au Valtin, dans les Vosges. Il meurt à 64 ans et est enterré au cimetière du Valtin.

 

Biographie : source : Wikipedia